Justine Marie promo Vinyasa Spirit 2019/2020

Et si pratiquer Svadhyaya c’était simplement prendre le temps de trouver ta voie? Svadhyaya signifie : l’étude des textes sacrés et de soi. Cette connaissance est intimement liée aux autres branches du yoga. Remettons ce mot dans son contexte. Yoga vient de la racine yuj qui signifie lier, unir. Ne faire qu’un avec quelque chose de plus grand que toi. L’objectif du yoga, pour Gandhi, est de “​considérer tous les évènements de la vie de façon paisible​” (1). Pour atteindre cet état de paix le chercheur individuel ou sadhaka doit suivre les 8 piliers du yoga :

  • Yama​ (règles en société)
  • Niyama​ (règles pour soi-même)
  • Asana​ (posture)
  • Pranayama​ ​(contrôle de la respiration)
  • Pratyahara ​(détachement de l’esprit)
  • Dharana​ (concentration)
  • Dhyana​ (contemplation)
  • Samadhi​ ​(état suprême ou le sadhaka fait un avec l’Esprit Universel)

 

Les ​Niyamas ​sont les règles que le yogi pratique pour lui-même, ses disciplines personnelles, pour progresser sur le chemin du yoga.​ Elles sont au nombre de cinq :

  • Shaucha ​– pureté
  • Santosha​ – contentement
  • Tapas​ – austérités, pratique du Yoga
  • Svadhyaya​ – étude du Soi (sa véritable nature) et des écritures sacrées
  • Ishwarapranidhana​ – abandon à ce qui est supérieur

Sva “signifie soi et adhyaya signifie étude et éducation”(2). Svadhyaya c’est donc un état d’esprit, une recherche personnelle de soi. Une façon de tirer le meilleur de toi-même. B.K.S Iyengar nous dit que la personne qui pratique svadhyaya “​lit le livre de sa propre vie en même temps qu’elle l’écrit et le corrige” (3)

Svadhyaya se définit donc selon deux points. L’étude des textes sacrés et la connaissance de soi. La question est donc pourquoi étudier svadhyaya et comment le faire ?


“​Svadhyaya c’est la répétition de mantras sacrés et de textes sacrées sur la spiritualité, dans le but de se comprendre soi-même​”(4).
Les textes donnent les grandes lignes directrices de réflexion. Ce sont des conseils que tu ramènes à toi pour te comprendre. Ils sont là pour te pousser à la plus haute réalisation de toi-même.
“Se comprendre depuis l’enveloppe extérieure jusqu’à l’être intérieur”(5).
Svadhyaya est une quête intellectuelle et intérieure qui nous mène sur la voie de la connaissance et de jñāna (la sagesse).

Mais ces textes sont aussi des outils qui nous relient à une puissance supérieure selon les croyances du yoga. L’objectif pour le yogi est de ne faire qu’un avec l’univers ou une forme divine. Dans l’espoir de recevoir des pouvoirs de cette divinité. Les vedas qui font partie de ces écrits sont des enseignements datant de milliers d’années. Ils étaient donnés par des Rishis, autrement dit des sages. Il existe plusieurs vedas (les rig veda, yajur veda, sama veda, atharva veda). Au départ ce sont des images et symboles de nature sous lesquels se cachaient des enseignements sacrés et secrets menant à la plus haute réalisation de soi-même pour ceux qui arrivent à en percer les mystères.

Ces vedas sont transmis de façon orale mais ils évoluent, ils sont modifiés dans le temps par les rishis toujours à l’aide de dhyana (la médiation) et de leur expérience personnelle. Ces nouvelles visions amènent de nouvelles formes d’expression. Les symboles disparaissent pour laisser place à un langage plus direct. Puis par écrit ce qui les rend moins accessibles par une partie de la population. Les vedas sont destinés à servir l’illumination spirituelle et la connaissance de soi. ils étaient conçus à l’origine pour servir tous ceux qui avaient le besoin ou la volonté de s’améliorer.

Les mantras quant à eux sont des chants ou des prières auxquels les yogis donnent une importance toute particulière. Pratiqués régulièrement et avec la bonne éloquence et le bon ton, on leur attribue des pouvoirs particuliers. ”L’étude des écritures et des formules sacrées nous permet le contact direct avec notre divinité tutélaire, le sadhaka obtient une vision de sa divinité tutélaire ou choisie qui accède à tous ses désirs” ​(​BKS Iyengar “​lumière sur les yoga sūtra de patañjali​”,Paris, Buchet chastel, 1993, II.44 p.178).

Les mantras nous poussent au contrôle de notre voix pour nous guider vers notre chemin, notre voie personnelle. Les mantras sont un peu comme des clés vers une forme de bonheur.

Au-delà des croyances inscrites dans les textes, Svadhyaya c’est aussi une quête personnelle. Cet apprentissage nous donne des outils pour nous positionner dans la vie. Il nous aide à faire des choix et à évoluer.

Te connaître, c’est trouver ton propre chemin​. Voilà pourquoi il est intéressant de s’étudier. Si tu ne sais pas d’où tu pars, tu ne sais pas où aller. Cela permet de se dégager de tes propres freins, de briser la boucle dans laquelle tu as l’habitude de vivre, ta routine, ta façon d’être, tes erreurs répétées. Il faut déjà les voir pour les comprendre. Savoir si cela te convient ou s’il faut le modifier. C’est la possibilité de prendre une autre route. Un chemin qui te ressemble plus. Mais se retrouver face à soi-même n’est pas une chose facile à faire. Il faut vouloir faire le bilan et est être prêt à peut-être aller vers l’inconnu.

Pour commencer, selon Osho Shailendra, nous apprenons à nous connaître selon 3 axes: “Ce que l’on fait, ce que l’on pense et ce que l’on ressent. Le corps fait, le mental pense et le cœur ressent”(6). Ce sont nos 3 objets d’études. Pour te connaître réellement il faut savoir si ces trois critères sont en phase. Si ce que tu fais correspond à tes sentiments et tes principes. Pratiquer Svadhyaya c’est être soi-même le sujet de ta propre étude. Il ne faut surtout pas se juger et ne pas rentrer dans l’interprétation de tes pensées.

Il est important de ne pas tirer de conclusion en imposant une idée. Au contraire, il faut se positionner de façon passive, face à nous-même. Cela demande de prendre du recul. Il faut observer, sans préjugé ni jugement ce qu’il se passe dans notre cœur, notre tête et notre corps.

En nous étudiant, nous ne devrions pas apprécier ou non ce que l’on voit. Ne pas mettre de valeur morale. Être indifférent et détaché de ce que l’on découvre pour avoir une vision vraie. Le but est de simplement savoir ce qu’il se passe. Faire preuve de contentement (santosha) face à nous-même. Nous sommes des observateurs de nous-même pas des juges.

Il est essentiel d’observer nos réactions face à nos pensées, notre ressenti. Aujourd’hui on t’a proposé de faire une nouvelle activité Est-ce que tu as été indifférent(e) ou heureux(se) ? Cela a pour but de connaître ses passions ce qui nous motive ou nous démotive.

Prendre du recul sur ta journée et noter comment tu as réagi face à une situation ou à une autre. On a critiqué ton travail, est ce que cela t’inspire ou au contraire est ce que cela te donne envie d’abandonner ?

Savoir comment on réagit c’est apprendre à se connaître. Par exemple, quand on sait ce qui nous déprime, on le laisse de côté. Généralement quand on connaît bien quelqu’un on sait déjà comment il ou elle va réagir quand on lui annonce quelque chose. Se connaître c’est faire un peu la même chose avec nous-même. Le seul détail, c’est que l’on ne prend pas le temps de le faire. Mais si on sait comment on réagit, on sait l’anticiper et donc, on sait changer son comportement.

Et c’est comme ça qu’on commence à avoir un impact sur notre vie. On a la possibilité d’évoluer donc on modifie notre contexte. Cela rejoint l’objectif des textes sacrés, “tout comme les arbres, plus nous voulons nous élever, plus nous devons nous enraciner profondément”(7). Autrement dit, plus nous devons travailler notre introspection.

“L’étude de soi dans deux directions. la première mène de la peau à travers les couches intérieures vers le témoin. quoique le corps ait une conscience il faut la canaliser par la pratique des asanas et du pranayama Au cours desquelles l’intelligence agit comme un pont pour relier la conscience du corps au cœur de l’être et vice-versa. Seule cette intelligence relais apporte l’harmonie du mental et de l’âme ainsi que l’intimité avec l’âme suprême”(8).

Il s’agit d’un dialogue entre notre corps et notre cœur par le bais de notre mental.
La méditation, c’est de là que les Rishis tiraient leur enseignement. Mais pour arriver à cet état de concentration, il faut libérer le corps et apaiser le mental.

La pratique des asanas était notamment conçue pour entrer en méditation. Mais on peut apprendre de nous-même par les postures. Il faut comprendre que “yoga is more about practicing for the real world than escaping from the real world for an hour”(9) Il ne faut pas fuir la vraie vie grâce au yoga mais plutôt prendre le temps de la comprendre grâce au yoga. On apprend de nos postures.

Fais-tu une pause quand tu en as besoin ou quand tu en as envie? Ou ne fais tu jamais de pause?
On va plus loin dans les postures quand on en a besoin ou quand on le veut? Ces petits détails sur le tapis sont aussi vrais dans la vie de tous les jours. Le yoga est un temps que l’on prend aussi pour s’observer. Observer notre corps sans le juger, se satisfaire de notre évolution, observer notre égo et nos émotions.

Socrate a interprété connais-toi toi même comme le fait que le savoir est en nous. Donc il est accessible à tous et la clé de ce savoir se trouve selon lui dans le questionnement. Il s’agit de découvrir la vérité qu’il y a dans chacun de nous. L’objectif de Socrate était le même que les rishis à savoir devenir un être meilleur. Savoir ce que l’on fait et pourquoi on le fait. Selon lui, s’interroger sur ce qui est bon pour nous commence à nous rendre meilleur.

Mais pour cela, il n’y a pas de professeur. C’est un travail, un questionnement personnel. “Svadhyaya se distingue de la simple instruction qui consiste à suivre des cours ou le professeur fait état de ses propres connaissances.” “Quand des personnes se rencontrent pour Svadhyaya, l’esprit de celui qui parle et l’esprit de celui qui écoute se confondent et ils éprouvent l’un pour l’autre amour et respect”(10).

Svadhyaya c’est l’éducation du soi et comme à l’école, cela passe par l’acquisition de connaissances par le biais de l’étude des textes dans le but de devenir meilleur. C’est un premier pas sur la voie de la sagesse. Ces textes et mantras ont été inspirés à des sages par le biais de la méditation il y a des millions d’années. Leur transmission s’effectue de façon orale avec des gestes et un ton précis. Ils sont porteurs de certains pouvoirs et ils sont des repères, des liens entre l’homme et le divin. Ils sont là comme des guides pour trouver notre voie.

Mais les connaissances et la recherche ne s’arrêtent pas là dans Svadhyaya. Pour nous élever, nous devons nous connaître nous-même, pour mettre en accord nos actes, nos idées et nos sentiments. Pour cela nous devons être notre propre observateur sans ressentiment ni jugement. Simplement s’observer pour savoir où on en est aujourd’hui. Svadhyaya est un travail à faire seul. Le professeur peut uniquement nous donner les clés pour le pratiquer. Comme travailler la méditation, le pranayama” et les asanas. C’est une recherche incessante pour connaître nos passions, comprendre nos humeurs et apprendre à contrôler notre mental. Nous sommes tous différents, c’est pourquoi il est important de se connaître pour pouvoir vivre avec les différences des autres.

(illustration : Harriet Taylor Seed – centralillustration.fr)

 

Justine Marie
Formation Vinyasa spirit france Svadhyaya / Octobre 2019

 

(1) ​BKS Iyengar, ​bible du yoga, P​ aris, J’ai lu, 1978, p.17
(2) BKS Iyengar, ​bible du yoga, ​Paris, J’ai lu, 1978, p.17
(3) BKS Iyengar, ​bible du yoga, ​Paris, J’ai lu, 1978, p.17
(4) BKS Iyengar “​lumière sur les yoga sūtra de patañjali​”,Paris, Buchet chastel, 1993, II.1 p.130
(5) BKS Iyengar “​lumière sur les yoga sūtra de patañjali”​ ,Paris, Buchet chastel, 1993, II.1 p.129
(6) [Osho Dhara]. (2015, nov, 19). ​What is the meaning of “svadhyaya ” -​ Osho Shailendra
(7) Marguerite Aflallo, (2009, jan, 15). yama niyama 3e partie
(8) BKS Iyengar “lumière sur les yoga sūtra de patañjali”,Paris, Buchet chastel, 1993, II.44 p.17​8
(9) [Bent yoga]. (2019, jan, 20). ​Svadhyaya: 8 Limb Path of Yoga (Niyamas)
(10) BKS Iyengar, ​bible du yoga, P​ aris, J’ai lu, 1978, p.48 illustration : margaux motin – viginie.fr

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